Conte

(Ecriture inspirée de la légende slave)

 

Stop aux violences faites aux femmes !

Je dis OUI. Et VOUS ?

 

Dans des temps non si reculés, vivait un jeune garçon prénommé Hinoufy. C’était un Géant. Très tôt, les échos de son fort tempérament le précédait dans son village. Toujours victorieux dans les défis organisés par sa communauté, il amassait médailles et récompenses en tous genres. Belliqueux et libertin par nature, il acquit une réputation des plus éloquentes. Ses pairs, qui le craignaient autant qu’ils cherchaient sa protection lui attribuèrent le titre de Commandant de sa province. Il se satisfait pour un temps de cette nomination. Mais ce qu’il voulait, c’était recevoir le titre de Chevalier de Légende. Il franchit les frontières de son état pour mesurer sa force dans de nouvelles contrées et acquérir cette reconnaissance.

Se déplaçant à grand bruit, le sol tremblait sous ses pas. La végétation s’inclinait sous son passage. Le lit des rivières jaillissait d’effroi.

Plusieurs années passèrent sans qu’aucune victoire ne lui échappe. Sa notoriété augmentait. Le respect, autant que la crainte imposés, par sa force et son courage suscitait l’admiration de bon nombre. Plus il recevait de témoignages des foules qui avaient entendu parler de lui, plus il se sentait puissant. Pourtant, ses vœux de grande gloire exaucés, il n’était toujours pas heureux. Il conclut qu’il souffrait de solitude. Il décida de choisir une épouse. Son choix ne se porta pas sur une géante comme lui. Il prit une femme ordinaire. Elle se nommait Elleu. Elleu connaissait la réputation d’Hinoufy. Mais elle était loin d’imaginer ce dont il était vraiment capable. Elle n’était pas au bout de ses surprises. Le jour des noces passé, Elleu prit le nom d’Elleufy ainsi que le voulait la tradition de son mari. Ne supportant absolument pas d’être seul, où qu’il aille, il emmenait Elleufy dans un coffre de cristal placé sur son épaule droite. Il voulait montrer à la terre entière qu’il avait trouvé l’amour malgré la crainte qu’il inspirait. Et en effet, Elleu était extrêmement tendre et prenait grand soin de son mari. Dans les premiers émois de leur union, Hinoufy, rendit Elleu très amoureuse de lui. Elle ne comprendra que plus tard qu’il calquait ses comportements sur les besoins de celle qu’il disait être sa Princesse. La douce naïve voyait en lui, l’amour qu’elle avait toujours cherché. Elle s’attacha à lui du plus profond de son être, jusqu’à s’y perdre. Au terme de quelques mois, Hinoufy recommença à être insatisfait. Chaque instant venu à partager avec sa femme, il devenait exécrable. Plus exécrable encore qu’avec ses ennemis pour lesquels il disait avoir plus de respect que pour elle. Plus le temps passait, plus il lui reprochait tout et rien. Il ne supportait pas la moindre opinion contraire. Il brisait tout autour de lui. Sa rage s’exprimait par de ravageurs accès de folie. Il détruisait tout autour d’eux. Il pulvérisait, par tant de violence, jusqu’aux fondements de l’essence qui les unissait. Démunie, et ne sachant plus comment prouver son amour immense à son mari, Elleu s’épuisa. Malgré les supplications de sa femme il continuait à la battre, l’insulter, la disqualifier. Plus elle se soumettait, plus il l’asservissait. Elleu tentait parfois de se défendre. Mais la force physique de son mari, sa haine pour elle, ses mensonges permanents, ses refus de discussion parvenaient toujours à bout de tout. Hinoufy contrôlait tout et se vantait souvent de ses énormes pouvoirs. Il avait coutume de dire qu’il était capable de faire plier le ciel jusqu’à la terre. L’ardeur de son désir d’être admiré à tout moment conduisait Hinoufy à recommencer à entretenir des relations libertines avec plusieurs autres femmes. Pourtant c’était Elleu qu’il accablait de projets de vie douteux. Par ses accusations véhémentes et ses virulentes demandes de preuves d’amour, il l’enchaînait dans la fidélité extrême. Leur vie se dégradait au fil de ses mensonges, au point qu’Hinoufy s’enfonça dans sa folie de destruction. La pauvre Elleu ne trouvait plus le repos. Un matin d’automne, Hinoufy exigea de sa femme qu’elle l’accompagne au village. Sur la route près d’un bosquet, Hinoufy vit un sac. Sur ce sac était écrit : « Je suis la vie des plus petits, tu ne peux ni la soumettre, ni l’emporter ». Convaincu d’être capable de réussir ce que nul n’avait pu faire, il descendit de sa monture pour relever le défi. Il posa les genoux à terre, agrippa le sac pour l’arracher du sol. Mais ses genoux s’enfoncèrent jusqu’à mi-cuisses. Il resta enlisé. Sa femme, emprisonnée dans sa boîte de cristal, assistait à la tragédie sans pouvoir secourir son époux. Il avait beau être si méchant avec elle, elle l’aimait. Elle entendait Hinoufy jurer par tous les diables qu’il était le seul homme à la hauteur de cette situation. Il n’avait pas compris le message inscrit sur le sac. « Je suis la vie des plus petits, tu ne peux ni la soumettre, ni l’emporter ». Ne parvenant vraiment pas à soulever ses genoux de terre, Hinoufy acheva sa course ici et rejoint le sort de ses semblables qui en d’autres temps et d’autres lieux s’étaient rendu coupable de la même présomption.

 

Piégée dans sa boîte de cristal, Elleu crie et crie encore pour que quelqu’un la délivre. Sous les coups de son époux, elle a perdu l’usage de ses jambes et de ses mains. Malgré ses efforts répétés, elle ne peut toujours pas s’extraire de sa prison de verre. Interpellée par ce qui n’étaient plus que des gémissements émanant de la boîte, une vieille femme s’approche. Elle ouvre le couvercle et écoute l’histoire d’Elleufy. La douleur d’Elleufy est si puissante qu’elle la sent dans sa poitrine. Alors la vieille femme lui tient la main toute la nuit. La femme sait à quel point cette souffrance est vive. Enfin, la nuit arrive à son terme, le jour commence à poindre. La vieille dame suggère à Elleu d’aller chercher de l’eau. Elleu lui explique que, sans bras ni jambes, elle ne peut fournir un tel effort. Elle est trop fatiguée. La vieille femme lui tend encore la main sans dire un mot. Elleu se demande vraiment, comment elle peut faire. Malgré son épuisement, Elleu sent monter une chaleur vague au milieu de son corps, une chaleur logée au plus profond de ses entrailles. Elle sait qu’elle en a grand besoin. Prenant une grande inspiration elle commence à ramper. Elle trouve la force de parvenir jusqu’à la source. Elle se hisse et prélève l’eau. Quand à son tour, Elleu boit cette eau, elle sent une sève chaude l’envahir. Elle tourbillonne en elle. Cette sève, c’est la sienne, elle la reconnaît. Pourtant elle n’a jamais eu cette puissance en elle. Ni cette saveur. La vieille dame partie, Elleufy monte sur le cheval de son époux. Elle sait que les pires moments sont derrière elle. Elle s’éloigne. De chaudes larmes coulent le long de ses joues. En repensant à son époux, elle songe que les pires tyrans sont ceux qui savent se faire aimer. Elle est seule maintenant, mais, elle est vivante et il n’y a plus que cela d’important !

Elle se guide au moyen de la ligne d’horizon. Elle consent maintenant à investir sa vie avec ses forces et ses fragilités. Elle veillera dorénavant à garantir sa sécurité. Mais, ce qu’elle souhaite vraiment, c’est continuer à s’émerveiller auprès de ceux pour lesquels elle compte vraiment. C’est à leurs côtés qu’Elleu continuera, sur le chemin quotidien, à glaner ses pépites de bonheur. C’est, d’autant qu’elle s’en souvienne, la substance la plus magique de la vie.

 

Moralité

Les survivants sont de puissants résilients